Jean-Pierre GEORGES
Jean-Pierre Georges est né à Chinon en 1949. Instituteur à Romorantin, il vit à Chabris. Jean-Pierre Georges écrit pour «se farcir la vie en tête à tête».
L’originalité de Jean-Pierre Georges, qu’on peut mesurer au ton de sa voix, réside dans un pessimisme qu’un sourire timide relève souvent. Quelle que soit la déréliction dont il nous entretient, l’apitoiement sur soi n’est pas de mise : on pense sans cesse au-delà, car sa voix dit bien l’humaine détresse que traversent des bonheurs de toute sorte ; « l’amour c’est fait pour ça / il y a plein de gens très tranquilles / au fond des tombes ».
Ah, merde, merde, merde. Que ces heures me
pèsent. Il faut que je sorte de moi, que je
gicle d'ici. Et me voici dans les rues avec un chien qui
me suit comme si j'étais son père, impossible de m'en
débarrasser, et maintenant il est devant avec son collier
pourri et ses oreilles sales et se retourne sans arrêt pour
voir si j'arrive, il n'en finit pas de lever la patte sur tout ce qui affiche verticalité. De quoi sommes-nous faits, je suis au bord des sanglots, la moindre petite maison palpitant dans ses branches me semble un fruit de la
création, - un maçon me fait plus d'effet qu'un poète -.
Et voici que je joue comme un gosse dans une venelle
avec les blocs de glace épargnés par le dégel. Plus loin,
entre un oratoire et une vieille vigne d'appellation
Valençay V.D.Q.S., ma vie me saute à la gorge, son désir
de vengeance est terrible. Elle me demande ce que j'ai
foutu, depuis tant d'années, et pourquoi, pourquoi j'en
suis arrivé là.