Jeanne BENAMEUR
Née en 1952 en Algérie d’un père tunisien et d’une mère italienne, Jeanne Benameur arrive en France, avec sa famille, à l’âge de cinq ans. Elle devient professeure de lettres et l’écriture s’impose à elle comme une force émancipatrice et revendicatrice, à la fois intime et partagée. Ses romans – Les Demeurées (2000), Laver les ombres (2008), plus récemment Les Insurrections singulières (2011) – l’ont révélée à un large public. Au point de nous faire oublier que son premier livre était un recueil de poèmes : Naissance de l’oubli (Guy Chambelland, 1989). En 2011, les Éditions Bruno Doucey ont facilité son retour à la poésie en publiant Notre nom est une île. Puis en septembre 2012 Il y a un fleuve et en septembre 2014 De bronze et de souffle, nos cœurs, avec des gravures de Rémi Polack.
Elle marche
Elle ignore où la mènent ses pas
Elle n'est la femme de personne
Il faut qu'elle soit libre
de suivre
le vent
qui passe.
Il regardera longtemps l’eau
et saura
qu’il faut construire
le bateau
léger comme le souffle
le bateau qui ne cherche aucune route
qui ne porte rien
que lui
et la parole nue
Les étoiles incrustées sous la chair
il faut vautour et rage
pour nous arracher
un peu
de ce qui brille
Et tant d’amour sans attente
pour garder la lumière
Trouver
invisible
l’empreinte d’une main
où poser la tienne
d’un pas
où mettre le tien
Tu apprends
lentement
la confiance
dans les traces de ceux
qui ont
disparu.
L’enfance de nos mères
est une terre sans aveunous y marchons pieds nus.
Empesés, silencieuxnous entrons
dans la géographie absente.