Marie HUOT
Marie Huot est née en 1965, au bord de la mer. Nourrie de littérature russe mais aussi des livres de Clarice Lispector, Marina Tsvétaïeva ou encore Jules Supervielle, Jean Giono, Anna Maria Ortese...elle envisage l'écriture comme une mémoire. Elle pense que ses livres sont des boîtes pour les voix perdues, des refuges contre l’oubli.
Elle habite à Arles.
A ce jour elle a publié une quinzaine de recueils.
Après de nombreuses publications en revues, elle a édité des livres aux éditions du Temps qu’il fait, dont Absenta (Prix Jean Follain 2002), Chant de l’éolienne (Prix Max Jacob 2007), mais également aux éditions du Bruit des autres, Encre & lumière, Cadran ligné, Al Manar, Circa 1924, Contre allée, Le Petit Flou,.. ainsi que dans des anthologies.
Elle lit volontiers ses poèmes lors de rencontres et festivals ici ou là .
Elle a également travaillé avec des peintres pour des livres d’artistes.
Je l'avoue
J'épie votre parole
Ce n'est pas
Non ce n'est pas ça
Je la prends à bras le corps
Comme un immense cadeau
Que je ramène dans ma maison
Tu poses ton manteau noir
Et la nuit tout entière s'effondre dans la
maison
Il y a alors un grand désordre
De belettes d'oiseaux
D'animaux frileux
Les plus petits trouveront refuge dans les
boîtes à sel
Et déjà elle ramasse le bois mors
Le verre pilé
Et se coupe le visage
Elle est un Indien
Sa peau lacérée
Rouge
Ses peintures de guerre sont plus belles
A l'instant de la rage où il ne la voit pas
Que dans tous les mouvements
De la lutte où il l'entraîne
Le beau jour
Où la mer fera céder
Ses grandes constellations
La voile unique de tes petits bateaux
Sera une enclume blanche
Tu traceras le chemin
Et les animaux sauvages qui le suivent.
Ce jour-là
Le regard des hommes
Sera une racine amère
Qui partagera la plage
Et dans la voile inversée du marin
Ta solitude.
Marie HUOT, La Renouée, Editions courts et longues, 2018
La vie
des années durant
m'a poussée comme un petit air qui emporte les cheveux
m'a donné du souffle de l'élan.
Ce soir elle a couru devant moi
m'a dépassée
je la regarde un moment marcher à vive allure
puis je la perds de vue.
Ira-t-elle à la rivière pour dormir dans ma maison ?
Ma nuit a le mauvais œil
elle trimballe des idées folles
sur ses chevilles fines elle vacille et manque de pot
Ma nuit nomade cherche un feu dans le paysage
avec sa langue non parlée
elle voudrait qu’on la comprenne
et lui accorde asile
fût-ce à un petit carrefour triste
et sous la neige