Pascal COMMÈRE
Pascal Commère est né le 17 décembre 1951 dans un village de la campagne bourguignonne où il vit et travaille.
Outre des livres d'artiste et des participations régulières à diverses revues (Le Mâche-Laurier, notamment, puis Secousse, revue en ligne), il publie poèmes et proses (récits, essais), soit une bonne trentaine de titres à ce jour, principalement chez Obsidiane et Le Temps qu'il fait où est parue en 2012 une importante anthologie de ses poèmes : De laines qui éclairent. Parallèlement, il a consacré une monigraphie au poète Petr Král (Editions des Vanneaux, 2014) et réuni en un volume (Lieuse, 2016) les récits de ses rencontres professionnelles avec les paysans. Fin 2017, paraît chez Tarabuste un livre de ses poèmes : Territoire du coyote.
Troisième enfant d′une famille qui en comptera cinq. Premier poème vers dix onze ans. Abandonne les chevaux après avoir débarqué dans une écurie parisienne. Raccroche un cycle d′études commerciales qu′il suit sans effort. Sa marraine se proposant de lui offrir des livres, il découvre la poésie moderne. Avec quelques amis, Christian Cailliès notamment, il fonde la revue NOAH qui publiera entre 1978 et 1988 une bonne vingtaine de numéros et quelques livres de poèmes. Parution de son premier récit (Chevaux, 1987) chez Denoël. 1989, Jacques Reda le publie dans la NRF.
Viens te faire aduler seigneur Cochon ! Sous ton plastron
le lard est or pour les temps roides,
viens te faire adorer, dorloter, boulotter,
prélat dont le groin dort ébaudi sur la boue.
Extrait de Bouchères
Ou ruisseaux comme vous, aller pas droit je pense,
parfois, ce serait bien dans la menthe en faisant semblant
de dormir pour mieux voir le rose d’une bête,
son nez sur l’eau qui boit, et les trous noirs
tremblant parce qu’une libellule ou un oiseau
sur une herbe se pose, ou, tout près, un remous
quelque chose qui bouge et, comme près d’ici,
habite le courant quand il fait chaud,
ou peut-être si la pluie, les mouches sur les bouses
près du taureau épais et ses bourses qui croulent
quand ses yeux baissent, et le soir,
avec les ombres l’herbe qui sent l’odeur
pas tout à fait des bêtes, et le blanc sale
des ombelles ouvertes ou pas complètement
– quand on tape dedans les graines, très vite,
font comme une fumée ou le vent, c’est pareil.
Ce serait bien, toujours, mais parfois une bête
pose sur l’eau son mufle – et c’est presque fini.
Alors je voudrais être -et d'une encre précaire
pour un grand livre jamais écrit peut-être
qui ne finirait pas, plein de choses qui vivent -
celui, avec des mots très petits, qui consigne
le monde, ses travaux ( peines -semailles noires )
et ses réparations: l'ordinaire entretien
des plus pauvres outils ( misère du cambouis )
mais tout est loin. Le coeur en bas ferraille
et c'est comme le froid, pour entrer, quand il cherche
l'étoile bleue des doigts. ..Images, mes trop belles,
moi aussi dans mon ombre à craindre le vinaigre
pour avec vous finir, sous les mots séchés comme
les bêtes dans l'été qu'on lève sous les bouses.
Je n'ai jamais eu beaucoup de temps pour vivre.
J'ai poussé entre deux feuilles. Entre deux liserons.
Avant que n'arrive la saison des ronces, nous n'avions que l'espace d'une moisson.
La plupart du temps, nous mourrions en route.
A toi soudain pensant je n’ai écrit ni un
poème ou une lettre à Pâques ou à Noël
comme si un poème ses mots herbes malignes
disait aussi l’absence (linge des yeux l’hier)
ou quelque chose encore à porter qui est lourd
tel un grand bout de bois et dedans au milieu
on t’a couché dedans un jour et moi je pense
depuis longtemps déjà que tu es dans chaque arbre
et tes yeux me regardent quand dans tes yeux je
ferme mes yeux mes mains aux bouts de bois pareilles
tout ce que j’ai de toi pour te garder je serre
et cette image en moi et les couleurs autour
sont comme le soleil en haut d’une côte quand
sur mon vélo courant après la pluie sur la route
comme après ton image en haut qui m’attendrait
et je pense à cela sur mon vélo parce qu’elle
grimpe la route avant d’être au-dessus mais toi
qui es passé déjà de l’autre côté est-ce
comme ici la pluie tombe-t-elle et les fossés
sont-ils pleins de menthe est-ce que les orties piquent